Création d’une Direction Générale des Élections, nouveau pilier du processus électoral

Conakry, 15 juin 2025 – Une étape déterminante vient d’être franchie dans la réforme du système électoral guinéen. Par décret présidentiel lu à la télévision nationale dans la soirée du samedi 14 juin, le Président de la transition, le Général d’armée Mamadi Doumbouya, a annoncé la création officielle de la Direction Générale des Élections (DGE), une structure chargée de piloter l’ensemble du processus électoral en République de Guinée.
Placée sous l’autorité du ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, la DGE jouit d’une autonomie financière et bénéficie d’un statut équivalent à celui d’une direction centrale, avec des ramifications techniques et territoriales solides.
Une institution structurée et dotée de larges prérogatives
La DGE aura pour mission principale de mettre en œuvre la politique du gouvernement en matière électorale. Elle est chargée, entre autres, d’élaborer les textes législatifs et réglementaires relatifs aux élections, de gérer et réviser le fichier électoral biométrique, d’organiser les scrutins politiques et référendaires, de concevoir les documents électoraux, de superviser la digitalisation des opérations électorales, et de coordonner la sécurisation des scrutins.
L’organe est également appelé à représenter la Guinée dans les rencontres régionales et internationales sur les questions électorales, tout en œuvrant à la promotion de la parité hommes-femmes dans la gestion des processus électoraux.
Une architecture organisationnelle complète
Le décret présidentiel précise que la DGE sera dirigée par un Directeur Général, nommé par décret sur proposition du ministre en charge de l’Administration du Territoire. Il sera secondé par un Directeur Général Adjoint, également nommé par décret. Ensemble, ils auront la responsabilité de coordonner, impulser et contrôler l’ensemble des activités de la direction.
Trois grandes structures composent la DGE :
- Les services d’appui, comprenant les affaires financières, la communication, et la documentation ;
- Les départements techniques, tels que l’opération, l’observation et accréditation, la logistique et la sécurité ;
- Les services déconcentrés, allant des directions régionales aux services communaux des élections, sans oublier la coordination électorale dans les représentations diplomatiques à l’étranger.
La gestion financière, la communication institutionnelle, ainsi que la conservation documentaire sont régies par des procédures clairement définies, visant à assurer rigueur et transparence.

Une réponse aux attentes de transparence et d’efficacité ?
L’annonce de cette réforme intervient dans un contexte politique sensible, marqué par une transition en quête de légitimité électorale et d’adhésion populaire. L’objectif affiché est clair : garantir l’organisation de scrutins transparents, professionnels et sécurisés, tout en assurant une maîtrise du processus électoral par l’État, à travers une structure spécialisée et dotée de moyens.
Mais cette centralisation des compétences électorales au sein d’une direction rattachée à l’exécutif n’est pas sans susciter des interrogations. Des observateurs, bien que saluant la volonté de structurer le processus, s’interrogent sur l’indépendance réelle de la DGE, notamment dans un environnement où la société civile et les partis politiques réclament plus de garanties d’impartialité.
Et la CENI dans tout cela ?
Cette nouvelle création soulève également une question fondamentale : quel sera le rôle de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), organe jusqu’ici en charge de l’organisation des élections en Guinée ? Le décret reste muet sur la cohabitation ou le remplacement des deux structures, laissant planer un flou institutionnel qui devra être éclairci rapidement.
Une réforme ambitieuse, mais à surveiller
La Direction Générale des Élections pourrait représenter une avancée majeure dans la modernisation du système électoral guinéen. Mais pour qu’elle inspire confiance, son efficacité devra s’accompagner de transparence, d’équilibre dans les nominations, et d’une gestion inclusive du processus.
Le décret prévoit que les responsables régionaux, préfectoraux et communaux de cette direction seront nommés par le président de la République, sur proposition du ministre en charge du territoire, une disposition qui suscite déjà des appels à la vigilance de la part des acteurs politiques.
À quelques mois des échéances électorales attendues dans le cadre de la transition, la DGE entre dans l’arène avec un rôle crucial à jouer, mais aussi sous le regard attentif d’une population exigeante, d’une opposition méfiante, et d’une communauté internationale en observation.